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Projet de guerre pour la campagne de 1741 remis a M^r le maréchal de Belle-Isle par M. le comte de Mortaigne, le 4 Juin 1741.

Le projet de conquérir la Bohême étant jugé préférable, l’on a dirigé le rendez-vous général de la marche des troupes dans cette vue.

L'Électeur marchera donc droit à Prague avec toutes ses forces.

L'Électeur couronné à Prague, on y laissera une garnison suffisante, et, se repliant sur la droite, on ira finir la campagne par le siège de Lintz et établir des quartiers d’hiver dans la Haute Autriche et dans la Bohême en se couvrant, en Autriche, de la rivière d’Enz, et en Bohême de la Moldave qui couvrira également la communication avec Prague. L’on détachera alors le corps nécessaire pour faire le siège d’Egra dont il faut se débarrasser. pour la sûreté des quartiers d’hiver et des communications avec le Haut Palatinat. Après sa prise, le corps qui en aura fait le siège se repliera aussi sur le Danube pour rejoindre le reste de l’armée, tant pour renforcer l’armée du siège de Lintz que pour former celle d’observation, si les ennemis exigeaient qu’on prit cette précaution.

L'Électeur fera incessamment relever la fortification de Charding, pour pouvoir avoir une tête de pont et s’assurer le passage de la rivière de l'Inn, mais il est à observer qu’il faut avoir des troupes à portée de Passau pour pouvoir s’en emparer au cas que l’ennemi fasse quelque démarche pour s’y porter, ce qui est à présumer lorsqu’il verra travailler aux fortifications de Charding.

Le poste de Passau est d’une conséquence infinie pour s’assurer un passage sur le Danube et la navigation jusqu'à Lintz, on ne saurait y donner trop d’attention. Quand on s’en sera emparé, on y fera faire des fours massifs.

L’Electeur fera passer son artillerie à Ingolstat, avec toutes les munitions de guerre propres a un siège, savoir : boulets, bombes, balles, grenades, poudre, pierre à fusil, outils à remuer la terre, toile propre à faire des sacs a terre, de la toile à charpie, des médicaments et drogues de chirurgie. Ce dépôt se trouvera à Ingolstat, à portée d'être poussé à Egra si on trouve à propos d’en faire le siège, ou de descendre le Danube quand on en aura besoin.

L’Electeur fera construire et mettre à portée du Danube, tous les agrès nécessaires pour la construction de deux ponts, savoir : chevalets, poutrelles, cordages et ancres, dont il lui sera envoyé un état ; on trouvera sur le Danube les bateaux nécessaires pour la construction des deux ponts.

L’Electeur fera faire des pontons pour un pont et des haquet pour les porter ; on lui en mandera le nombre et on lui enverra des desseins et des détails de la construction.

Il sera fait des dépôts de blé et de farine dans plusieurs parties différentes du Danube, pour être poussé en avant lorsqu’il sera nécessaire ; on en peut mettre à Donawert, à Ingolstat, à Straubing, à Passeau quand on s’en sera rendu maître et dans plusieurs autres endroits convenables au long du Danube. Il en faut pour 4 mois sans y comprendre ce qu’il faudra aux troupes du Roi pour achever leur marche jusqu’au lieu de jonction. Cette jonction et assemblée générale se fera à Neumarck pour l’Infanterie, et sur la rivière Domberg pour la cavalerie.

L’armée y séjournera 8 jours en partant du rendez-vous susdit les troupes porteront ou seront munies de pain pour 12 jours.

Outre les fournitures ci dessus, il faudra que l’armée porte à sa suite pour 30 jours de farine, qui seront déposées au lieu qui sera jugé convenable pour y établir les fours.

Il est bien entendu que l’armée en partant du rendez-vous général où elle s'était reposée 8 jours, l’on distribuera aux troupes le pain pour 4, les caissons emporteront du biscuit pour 4 autres et du biscuit pour la troisième distribution. A l'égard des 30 jours de farines, elles seront portées par des chariots de paysans.

On ne peut designer positivement les endroits où il sera nécessaire de faire trouver du pain pour achever la marche des troupes du Roi jusqu’au rendez-vous général tant que les marches ne seront constituées, mais y ayant des farines en dépôts à Donawert, on sera en état de les pousser où on en aura besoin, c’est-à-dire au lieu où les 3 colonnes se trouveront le vingtième jour de leurs marches, et il faudra leur y en porter pour huit à dix jours. C’est ce qui sera décidé quand M. de Mortagne aura achevé sa première marche et qu’il donnera l'état fixe de la marche des colonnes.

La marche des troupes du Roi jusqu’au lieu de jonction peut être évaluée à 30 jours. Elles mèneront ou porteront du pain avec elles pour vingt. Ainsi, c’est pour dix jours qu’il en faudra pour achever la marche sur le pied de 66924 rations de pain, pain biscuité, ou biscuit par jour, à 24 onces la rations, deux tiers de froment et un tiers de seigle ; il faut observer, pour le pain biscuité, que la pâte doit avoir une couple d’onces de plus par livre, pour que le soldat y trouve son compte, et que le biscuit doit être de pur froment et mis dans des tonneaux a raison de 1000 rations dans trois tonneaux par caisson. le nombre des rations sera augmenté et diminué suivant l'état des troupes qui aura été constaté et subséquemment pour chaque colonne.

On doit sans perdre de temps travailler à ces premières dispositions à Donawert, et, quand les marches seront constatées, on enverra à l'Électeur un état définitif des lieux où les convois devront être conduits pour les trois colonnes.

C’est aussi sur le pied de soixante six mille neuf cent vingt quatre rations de pain par jour qu’il faudra que les convois d’Ingolstat partent pour être au jour marqué au rendez-vous général de Neumark et de la rivière Damberg, aussi bien que les farines pour trente jours. Comme il a été dit ci-devant, de ces vingt jours de pain, il y en aura 4 en biscuit. Ainsi il faudra des tonneaux sur le pied qu’il a été dit ci-devant a raison de 1000 rations dans trois tonneaux.

L’Electeur aura donc à mettre, dans des dépôts différents, et le plutôt que faire se pourra, du blé pour qu’il soit fournis aux troupes du Roi du pain, du pain biscuité ou du biscuit, savoir de Donawert pour dix jours, pour achever la marche pour la jonction d’Ingolstat, pour vingt jours tant pour les séjours au dit lieu de jonction que pour les premiers jours de marche et les 30 jours de farine, et pour trois mois en sus de grain ou farine, ce qui fait au total pour 150 jours de subsistance à raison de 66924 rations par jour sur le pied proposé, et qui augmentera ou diminuera à proportion de la force de l’armée. Il faut que cet approvisionnement soit converti en farine au plus tôt, surtout la quantité nécessaire pour le convoi de Donawert et celle pour Ingolstat qui est bien plus considérable.

L'Électeur fera faire 45000 sacs de treillis de la meilleure qualité. Il faut que chaque sac, pour contenir 202 livres de blé ou farine, poids de marc, ait quatre pied du Roi de haut et deux pieds de large.

Il faudra aussi 40000 sacs à mettre de l'avoine qui soient de bonne toile, propre à résister à la fatigue, où il puisse contenir douze boisseaux d'avoine, mesure de Paris, la poignée franche, ce qui fera 18 rations par sac, la ration étant de deux tiers du boisseau.

Il sera indispensable de faire trouver au lieu de jonction du fourrage pour les troupes, du moins de l'avoine s'il n'est pas possible d'y avoir du foin. Cela est nécessaire pour remettre la cavalerie des marches qu'elle aura faite et la mettre en état de commencer les opérations de guerre. Le pays y trouvera aussi son compte, puisque sans cela il faudrait le fourrager.

Il faudra par jour 28721 rations d'avoine et autant de foin s'il est possible. La ration de foin doit être bottée sur le pied de 18 livres la ration.

Comptant sur le pied de huit jours de séjours cela fera 229768 rations.

L'avoine sera ensachée sur le pied de 12 boisseaux, mesure de Paris, la poignée franche, comme il a été dit ci devant.

Il sera indispensable de faire trouver de la paille au lieu de jonction pour coucher le soldat. Il en faudra environ 40 à 50000 bottes à 10 livres la botte.

Il faudra aussi du sel et du tabac pour les soldats.

Tout ce qui est détaillé ci-dessus ne concerne que les troupes du Roi. L'Électeur en fera l'augmentation à proportion de ses troupes, ainsi que des caissons au prorata de ceux du Roi qui en aura 600 pour les vivres et 20 pour l'hôpital et des chevaux haut le pied.

On conviendra de la quantité d'artillerie que S.A.E. devra mener, et cela de bonne heure, pour qu'elle puisse faire préparer les équipages nécessaires.

L'Électeur fera aussi faire des fours de cuivre (?) au prorata de ses troupes, avec des haquets pour les porter ; le Roi en aura 25. il faut que les fours soient accompagnés de garçons boulangers, de maçons, de serruriers et de tout ce qu'il faut d'ustensiles pour les servir.

On en verra un état de ce qu'il sera nécessaire de faire pour l'hôpital du Roi, ainsi que de la quantité de paire de souliers.

Plusieurs paragraphes et articles de ce travail de M. de Mortaigne seront ensuite ajoutés ou modifiés par M. le Maréchal de Belle-Isle.

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