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Source :
SHAT, A4 86, Envoi Wagner, pièce 6E - Copie des archives de La Haye.

 

Relation du combat auprès de Grimberghen le 23 août 1745.
(Missive du Prince de Waldeck, non datée, aux Etats-Généraux)

 

Le 23 août, l’ennemi voulant s’emparer du poste de Grimberghen, y enlever les compagnies franches et 100 hommes d’infanterie hanovrienne que nous y avions dans deux châteaux, se mirent en marche le soir du 22 à 7 heures, de leur camp de Lippeloo et défilèrent devant le Roi et le Dauphin avec les troupes suivantes commandé par le lieutenant-général Le Danois et le major-général de Souvré :

Régiments Bataillons
 

Irlandais
Picardie
Roi
Touraine
Royal Vaisseaux

7
4
4
4
4

2 hommes par compagnie de toute l’armée
30 compagnies de grenadiers
50 hommes du piquet de la Maison du Roi
1 piquet de petite gendarmerie
2     id    de Carabiniers
1     id    de chaque régiment de cavalerie de toute l’armée
1     id    de grenadiers à cheval
4 pièces de canon de 12# de balle
4            id             de 4# qu’on a avancé jusque dans Grimberghen
12 pièces de canon qui sont restées à leur arrière-garde

Le lendemain à 6 heures du matin, ils entrèrent dans le village de Grimberghen, occupèrent toutes les avenues, y postèrent de l’infanterie et firent avancer quelques escadrons sur les hauteurs en avant ; se croyant ainsi en sécurité, ils firent sommer au nom du général-major de Souvré, qui commandait l’attaque, le capitaine Frelon qui occupait le château du Prince de se rendre avec les compagnies franches ; il le refusa disant qu’il n’y avait point de canon, sur quoi ils le firent avancer, et le sommèrent de nouveau ; il persista à ne vouloir pas capituler, et leur assura qu’il était résolu, d’avoir son tombeau sous les ruines de la maison. Outrés de son refus, ils commencèrent à tirer avec 4 pièces de 12# de balle sur le château sans ébranler la fermeté du commandant qui n’avait que 50 hommes avec lui, 100 étant détachés pour enlever un poste de Grassin près d’Ascher, ce qu’ils ont exécuté heureusement, ayant pris un capitaine et 6 cavaliers. Leur canon était pointé avec si peu de dextérité qu’ils n’endommagèrent presque pas le bâtiment ; dans le même temps, ils firent attaquer le poste des Hanovriens qui se rendit après quelque résistance ne contant pas sur un prompt secours.

Instruit de la disposition des ennemis,  Monseigneur le Duc fit avancer les troupes suivantes :

Régiments Bataillons
 

Gardes à Pied
Montagnards Ecossais

3
1

500 hommes du piquet

 

Gardes du Corps à Cheval
Grenadiers à Cheval
Cavalerie Hollandaise

2 escadrons
1      ‘’     
3      ‘’  
   

2 pièces de canon de 6# de balle
4             id             de 3#     ‘’

Aussitôt que ceux la commencèrent à paraître, S.A.R. fit avancer quelques batteurs d’estrade du régiment des Montagnards qui attaquèrent leurs postes avancés des dragons et leur firent prendre la fuite, quoique fort supérieur en nombre ; ces dragons, ayant gagné le village, donnèrent l’alarme aux troupes qui abandonnèrent leur entreprise sur le château, ramenèrent leur canon, firent replier leur postes l’un sur l’autre, vidèrent le village avec précipitation, nonobstant quelques abatis traverses et épaulements qu’ils y avaient fait ; ensuite ils firent ranger la cavalerie sur une hauteur derrière le ruisseau pour cacher la retraite de leur infanterie. Notre petit corps s’avançait toujours en bon ordre mais ne put jamais atteindre leur arrière-garde à cause de la quantité des défilés ; les troupes irrégulières des ennemis, cachées derrière les haies et dans les blés, lâchèrent quelques coups de fusils, mais à l’approche des Montagnards ils se sauvèrent avec une vitesse si incroyable que je les suppose touts coureurs de leur métier.

S.A.R. fit placer 2 pièces de canon de 6# vis-à-vis la cavalerie ennemie, qui la saluèrent si bien que nous la vîmes flotter, s’ouvrir et marcher avec confusion pour gagner le penchant d’une montagne où elle était à l’abri de notre canon, et de là ils enfilèrent le chemin de Londerzeel vers leur camp. Nous avons eu quelques prisonniers et plusieurs de leurs gens ont été blessés et tués selon le rapport de leurs déserteurs.

Nous ignorons encor quel peut avoir été le dessein des ennemis de venir avec un si gros corps et tant d’artillerie, pour lever deux postes si peu redoutables ; il n’est pas apparent d’autant plus que ce même jour le reste de leur cavalerie a été bridé et sellé pour soutenir le détachement.

Il faut avouer qu’ils ont fait grand bruit et peu de besogne.

 

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Note du webmaster : Le poste de Grimberghen, de même que ce lui de Kockelberg ou même Bruxelles, servait de base aux hussards et corps francs alliés (dans les rangs desquels figuraient bon nombre de déserteurs français) qui menaient des raids sur les convois de ravitaillement français. Au cours du mois d’août 1745, 3 tentatives eurent lieu pour tenter de s’emparer de ce poste, comme l’a relaté PICHAT dans son ouvrage « Les campagnes du Maréchal de Saxe dans les Flandres, de Fontenoy à la chute de Bruxelles » :

« (…) Le matin du 8 août, quelques Grassins et fantassins faillirent enlever la compagnie franche de Grimberghen. Cette dernière n’eut que le temps de se réfugier dans un château d’ou un renfort la délivra (01). Tentée à nouveau dans l’après-midi du même jour, une nouvelle surprise échoua encore. Le 20, un troisième essai infructueux donna lieu à un combat violent. Grassin envoya d’Afflighem trois détachements de 30 hommes chacun, par des routes différentes, le tout appuyé par une compagnie de grenadiers, soit au total 150 hommes environ (02). Un des groupes commit l’imprudence de se laisser voir vers Kockelberg et aussitôt l’ennemi prit chasse. Les Grassins se replièrent sur la compagnie de grenadiers embusquée en soutien dans Zellick. Le hasard fit que Waldeck en tournée d’inspection de ces postes survint à ce moment. Il fit sortir quelques troupes du voisinage auxquelles il joignit les dragons de son escorte et tout ce monde enferma nos 150 soldats dans Zellick. Pendant deux heures, les français y soutinrent un combat acharné. 20 ou 30 seulement purent s’échapper ; le reste fut pris ou tué. Le lendemain l’ennemi renforça Grimberghen d’une compagnie franche autrichienne (03). Il devenait urgent d’agir vigoureusement.

« Le 22 au soir une expédition partit du camp de Lippeloo commandée par M. Le Danois lieutenant général assisté de trois maréchaux de camp et comprenant 19 bataillons, 24 compagnies de grenadiers, 120 chevaux et du canon (04). En même temps 300 Grassins envoyés d’Afflighem s’engageaient sur la chaussée vers Bruxelles couvrant de ce côté la marche du détachement.

« Après une marche de nuit, le 23 à 5 heures du matin l’avant-garde française, commandée par M. de Lorges (12 compagnies de grenadiers, 12 piquets, 100 carabiniers, 4 canons) occupa la hauteur de Grimberghen d’où l’on découvrait Vilvoorde poste important de l’ennemi et pont sur le canal. Elle prit ses dispositions pour arrêter tout ce qui pourrait sortir des lignes pragmatiques de ce côté. Pendant ce temps M. de Souvré qui venait derrière avec 12 compagnies de grenadiers, 12 piquets et 4 canons s’avança résolument sur Grimberghen. Enfin M. Le danois en queue de colonne s’établit entre Beyghem et Wolverthem sur deux lignes, cavaliers en première ligne et fantassins derrière, pour barrer la plaine comprise entre ces villages (05).

« Une partie de l’ennemi occupait les deux châteaux de Grimberghen. Le reste se tenait dans le hameau d’où 400 hommes environ sortirent et se portèrent hardiment contre de Lorges dès que celui-ci apparut. Accueillis à coups de canon, les ennemis rentrèrent dans Grimberghen en même temps que Souvré sommait les deux châteaux de se rendre (06).Le plus petit de ces deux réduits de la défense défendu par une centaine de hanovriens se rendit tout de suite. L’autre occupé par des Anglais et des déserteurs français résista. M. de Souvré ne disposant que de pièces à la suédoise se rapprocha alors pour faire brèche dans les murailles (07).A ce moment environ 2 000 ennemis avec de l’artillerie apparurent dans la plaine du canal au sud de Vilvoorde. Le duc de Cumberland accourait en personne de sa propre initiative avec des renforts. Attiré par le bruit du combat, il avait franchi le canal on ne sait où et il commençait à passer le ruisseau de Grimberghen (08). La surprise échouait. Le Danois allait être obligé de donner à son tour en sorte que toutes nos troupes se trouveraient engagées. Bien que la situation de Cumberland l’exposât à se faire culbuter dans le ruisseau où il ne pouvait traverser qu’assez lentement, on ne voulut point tenter l’occasion. Le Danois donna ordre à ses lieutenants de se replier sur lui et battit en retraite par Londerzeel faiblement poursuivi (09).

« La surprise manquée de Grimberghen ne ralentit pas l’ardeur des pillards ennemis. Le 31 août ils enlevèrent encore 200 chariots destinés aux magasins de Ninove qu’ils cherchaient à incendier, sans succès d’ailleurs (10).Il sembla même que les alliés voulussent étendre le champ de leurs exactions, car ils envoyèrent des partis sur Maubeuge et sur Charleroi (11). (…) »

Les approvisionnement nécessaires étant rassemblés dès le 1er septembre, les mouvements de l’armée française à partir du 8 firent ensuite perdre de l’importance à ce poste.

 

Note 01 : Waldeck, 8 août.

Note 02 : Scovaud (major des Grassins) à d’Argenson, abbaye d’Afflighem, 21 août.

Note 03 : Waldeck, 20 août.

Note 04 : Brézé, 24 août.

Note 05 : Brézé, 24 août.

Note 06 :Waldeck, 23 août et Rapport de Waldeck aux Etats sur le combat de Grimberghen.

Note 07 : Archives de la guerre. Mémoire sur la campagne de 1745 par un rédacteur anonyme.

Note 08 : Waldeck, 23 août.

Note 09 : Brézé.

Note 10 : Crancé (commissaire du détachement de Clermont-Gallerande) à M. de Saxe, Enghien, 31 août.

Note 11 : Waldeck, 28 et 31 août. Ces troupes allaient commettre de telles déprédations que le maréchal serait bientôt obligé de prendre d’importantes mesures.

 

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